Moka : comprendre un cheval et ses problématiques

Vous avez été nombreux à réagir à la vidéo et je vous dois un grand merci !

La semaine dernière j’ai posté une courte vidéo de Moka qui tourne à la longe. Vous avez été nombreux à donner votre avis : irrégularité, gêne, certains ont parlé de boiterie mais quelle en était l’origine ? là encore les retours son nombreux !

Ils montrent à quel point l’observation est importante !

Avant de raconter l’histoire complète de Moka, je veux d’abord répondre à vos observations : oui, il y a bien une irrégularité visible ; oui, vous avez bien vu quelque chose à l’antérieur droit ; non, ce n’est pas forcément « une boiterie simple » due à une seule cause locale. La locomotion est un symptôme, pas automatiquement la cause. Savoir graduer la gêne, la décrire et la filmer correctement, c’est la première étape et c’est ce que nous voyons dans le module locomotion de la formation EquiVital.

Analyse de la locomotion:

ce que j’ai observé (et ce que vous avez souvent bien vu):

• antérieur droit : Il ne fonctionnait pas correctement ( on a changé de maréchal depuis). A ce moment là on pouvait constater une asymétrie des sabots antérieur. Et un léger High-Low.

• Gêne marquée sur tout l’arrière-main et bien plus présente à la main droite : Pourquoi à main droite me direz-vous ? Parce que le système digestif du cheval est plutôt positionné sur le côté droit. Le saviez-vous ? Cette inflammation induit évidement des compensations en chaîne dans une grande partie de son corps. Donc beaucoup de vos réponses étaient partielles mais juste ! Vu son pas vous ne serez pas étonnés si je vous dit qu’il ne voulais même plus trotter…

Ces observations permettent d’orienter des hypothèses, mais elles nécessitent un bilan pluridisciplinaire (ostéo, massage, podologie, nutrition, véto). Ce chemin d’analyse : observer, graduer, orienter : c’est précisément ce qu’on enseigne dans la formation Equivital et c’est ce que je pratique quotidiennement quand je rencontre vos chevaux.

Comment on en est arrivé là? Voici l'histoire de Moka:

Rencontre et arrivée (été-automne 2023)

En 2023, pendant une période de forte chaleur, j’ai acheté Moka, un jeune cheval de trait comtois (oui je voulais quelque chose de rustique et pas compliqué…lol) . Lors de la visite j’ai noté du free-fecal water (liquide après les crottins) ; mais avec 35°C ce jour-là, je l’ai d’abord attribué à la chaleur. Moka venait d’une vie au parc, au milieu des congénères, une vraie vie de poulain et sur ce point je n’ai aucune critique : on accompagne à partir de ce qui est.

Moka à son arrivée et un an plus tard

Premier hiver à la maison : premiers signaux digestifs

Dès le premier hiver à la maison, malgré une stabulation, une alimentation adaptée, des grands parcs et beaucoup de mouvement, j’ai observé :

• fesses constamment sales ;

• queue transformée en paquet de crottins séchés ;

• transit instable.

Progressivement, j’ai identifié le schéma : le phénomène de liquide apparaissait surtout quand il passait du pâturage au foin, ou quand l’herbe fibrait (herbe qui sèche, qui monte). Ce n’était pas lié à la pluie ou à une variation météo : c’était lié au type de fourrage (foin / herbe qui fibre).

Moka dans un de ces nombreux parcs

Tentatives et tests (année 1 et2)

J’ai mis en place des ajustements :

• Modifications d’alimentation et notamment de fourrage (j’ai essayé à peu près tout ce qui est disponible dans ma région)

• Soutien de l’estomac (traitement des ulcères pour éliminer une origine gastrique),

• Observation.

L’estomac a bien réagi ce qui confirme la démarche logique d’« amont d’abord » — mais les intestins restaient problématiques.

Digestion de l'herbe printanière

Été 2025 : Étape majeure

L’été 2025 a été très sec à la maison, l’herbe a fibré rapidement et les signes se sont amplifiés :

• Abdomen très gonflé, dur et douloureux (vraie « bouée » derrière les côtes),

• Gêne locomotrice importante comme vous l’avez constaté sur la vidéo,

• Impossibilité de trotter à la main droite.

Ce n’était pas une question d’attitude ou de dressage : son corps était incapable. Pendant cette période, il a bénéficié d’ostéopathie et de massages. Quand les tensions mécaniques les plus marquées ont été soulagées, ce qui restait était digestif. De plus, il s’est mis à se gratter la crinière un indice probable de malabsorption/affaiblissement immunitaire.

Pieds, podologie et interventions pratiques

En parallèle des bilans, on a observé ses appuis :

• Antérieurs de morphologie différente ;

• Présence d’un léger high-low en cours de correction ;

• Parage adapté (pas de ferrage pour un jeune de 3 ans) avec travail coordonné maréchal / ostéo / massage.

Les interventions sur les pieds ont nettement aidé l’avant, mais si l’origine première est la gêne digestive, la correction podale seule ne suffit pas à tout régler. D’où l’importance de la prise en charge globale.

Alimentation : un virage nécessaire

Avec mes études agricoles (production animale, cultures fourragères), j’ai revu sa ration mais toujours en lien étroit avec une nutritionniste équine (car chacun son métier et mes connaissances datent un peu....) et les vétérinaires :

• Rééquilibrage ,

• Compléments ciblés anti-inflammatoires et digestifs,

• Adaptations saisonnières (attention accrue en hiver et en saison sèche).

En quelques semaines on a vu des changements : Moka a « dégonflé » (perte de 4 trous de sanglage sans perte de masse), l’inflammation a baissé, et sa locomotion s’est bien améliorée même si ce n’est pas encore parfait.

Immunité, malabsorption et impact global

La malabsorption intestinale dépasse le problème « selles molles ». Elle provoque :

• Inflammation chronique,

• Diminution des apports utiles au corps,

• Affaiblissement immunitaire (ex. prurit/crinière),

Pour Moka, il fallait agir sur la nutrition et l’inflammation pour que la mécanique (pieds, muscles, ostéo) puisse récupérer durablement.

Où en sommes-nous aujourd’hui ?

Aujourd’hui :

• Locomotion plus stable (encore variable selon les jours),

• Inflammation digestive en baisse (mais on a pas terminé le travail là-dessus),

• Plus de réticence à main droite,

• Travail repris en douceur : si un jour n’est pas bon, on marche, on balade, on fait du travail à pied, longe, …

• Sous la selle ; il a fait un peu de pas et de trot, on y va tranquillement.

• Pas vraiment de solution vétérinaire miracle, de leur propre aveux il faut continuer ce qu'on a entrepris,

C’est un cheval vif et curieux : nous alternons les activités pour entretenir son esprit et son corps.

Ce qu’il faut retenir :

La vidéo montrait une irrégularité. C’est un excellent point de départ d’observation. Mais la locomotion est un symptôme et souvent le reflet d’un désordre systémique.C’est toute l’analyse, les petits détails, la collaboration entre pros et les connaissances personnelles qui permettent de tirer une conclusion utile et d’aider le cheval réellement.

Le lien avec Equivital

Je raconte l’histoire de Moka parce qu’elle illustre concrètement ce que l’on enseigne dans Equivital :

• Apprendre à voir et à analyser une observation,

• Savoir relier locomotion, anatomie, nutrition et podologie,

• Comprendre quand s’orienter vers un vétérinaire, un ostéopathe, un masseur ou un maréchal.

Les modules de la formation Equivital sont conçus pour vous apprendre ces outils d’observation et d’orientation pas pour remplacer les professionnels, mais pour vous permettre de dialoguer avec eux de façon plus précise et utile.

Conseils pratiques si vous observez quelque chose de similaire

• Notez précisément les signes : moment, main, type d’appui, évolution.

• Filmez la locomotion (pas/trot, main droite et main gauche).

• Faites un premier bilan ostéo + parage + examen vétérinaire.

• Travaillez parallèlement sur l’alimentation (avec une spécialiste si besoin).

• Soyez patient(e) : la prise en charge globale demande du temps mais évite bien des erreurs de parcours.

Merci pour vos analyses et vos retours sur la vidéo et continuez à observer votre cheval !

Soyez rassuré, Moka va mieux et vous remercie pour votre lecture!